Lestienne : "L'impression d'être dans un cercle vicieux"
ITW / Le MagOn peut avoir 31 ans et ressentir le même émerveillement qu'un jeune joueur de 18 ans en découvrant les grands tournois et les magnifiques courts à travers le monde. Constant Lestienne ne dira pas le contraire. Le Picard, gêné par des blessures tout au long de sa carrière, peut enfin s'exprimer depuis deux saisons et fait des ravages. Cette année, le Français a pu jouer pour la première fois les quatre tournois du Grand Chelem, mais aussi les grands tableaux d'Indian Wells et Rome. Rien que ça. À 31 ans, Constant Lestienne a encore très faim, comme il l'a expliqué en entretien avec Tennis Actu il y a plusieurs semaines. Aller chercher le Top 30 est clairement sur la liste des objectifs !
Tennis Actu avec Constant Lestienne, 31 ans, 87e mondial !
Frustré par une blessure au mollet en première partie de saison, l'actuel 87e joueur mondial, monté jusqu'à la 48e place en février, s'est accroché, repassant notamment en Challenger pour revenir dans les 100 et pouvoir espérer une année 2024 pleine et sans pépin.
"J’étais tellement content de jouer les gros tournois que j’essayais d’y aller, mais mon mollet a rechuté"
Comment ça va ? Tu as digéré la défaite en finale des Interclubs avec Loon Plage ?
Ça va très bien malgré la défaite aux Interclubs. On a joué le super tie-break du match décisif avec Lucas (Pouille). J’espère qu’on soulèvera la coupe l’année prochaine.
On imagine que voir Lucas retrouver la flamme, c’est top ?
Oui oui ! Lucas, quand on l’a dans son équipe, c’est monstrueux. Il est animé par ça, par l’esprit d’équipe. Avec Lucas, on était comme des dingues. L’équipe était top et on a vécu de belles semaines.
Cette année, tu as commencé 65e, tu finis 87e en ayant été 48e en février. Trois titres en Challenger. Quel bilan fais-tu de ta saison ?
Mon bilan est très simple. Le néant complet en première partie d’année, car je me suis blessé au mollet trois fois entre Bercy et Roland-Garros. J’étais tellement content de jouer les gros tournois que j’essayais d’y aller, mais mon mollet a rechuté. J’avais tellement envie de découvrir ces tournois après 10 ans. J’étais tenté de jouer pour découvrir et pour les prize money alors que je n’étais pas prêt. À partir de Munich, j’ai décidé de couper sept semaines pour pouvoir jouer mon premier Roland. Ensuite, je n’avais plus trop de confiance, je perdais mes points. Je suis retourné en Challenger et j’ai réalisé une fin de saison incroyable avec trois titres. Ça m’a vraiment fait du bien pour revenir dans le Top 100 et pouvoir jouer le grand tableau de l’Open d’Australie.
Avec ces blessures de retour, as-tu eu peur de rebasculer dans les mêmes difficultés que par le passé et de ne plus pouvoir vivre ton rêve ?
Oui oui… ça me faisait peur dans le sens où j’avais l’impression que c’était un cercle vicieux. Ça rechutait à chaque fois. Je me posais des questions. J’ai fait ce qu’il fallait et tout ça est derrière moi.
Tu as affronté neuf Top 50, neuf défaites, est-ce que tu as identifié ce qu’il manque pour franchir ce cap ?
J’ai existé. Certaines fois, je n’étais pas dans mes meilleures dispositions. Je ne me fais pas de soucis pour mon niveau de jeu. Je suis persuadé que je peux le faire.
"La même sensation qu’un mec qui découvre à 19 ans. J’étais comme un dingue"
Tu as joué les quatre grands tableaux de Grands Chelem pour la première fois cette saison. C’est avec ça que tu t’es dit que le travail payait ?
J’ai énormément savouré l’Open d’Australie et Roland-Garros surtout. Ensuite, moins parce que je sentais que je ne pouvais pas beaucoup gagner. Par contre, avec du recul, c’était dingue de me retrouver sur ces tournois en regardant d’où je viens. J’ai vraiment savouré. Je me suis arraché pour regagner ma place en 2024 dans ces tournois.
Même à 30 ans, tu étais comme un enfant impressionné quand tu as découvert les grands tournois ?
Oui oui… J’étais un débutant. La même sensation qu’un mec qui découvre à 19 ans. Pour ceux qui me connaissent, je suis un peu enfant. J’adore jouer et découvrir. J’étais comme un dingue.
En août 2022, tu avais dit à Tennis Actu que ton rêve était de faire une saison sur le circuit ATP, ça a bien été un rêve à vivre ?
Non justement. Je n’ai fait que six mois dans l’année. Ça reste pour moi la clé. Il faut faire une saison pleine et c’est mon objectif en 2024. C’est ce qui fera la différence pour moi.
Tu as 31 ans, mais ta progression ne semble pas finie. Tu espères suivre un peu les traces d’Adrian Mannarino, très solide et épanoui sur le circuit après ses 30 ans ?
Manna, c’est énorme ce qu’il fait. Il joue son meilleur tennis à son âge. C’est très fort. Il arrive à une maturité et connaissance de lui-même qui le rend très fort. Son tennis n’a pas énormément changé, je pense. Il est sûrement plus sérieux sur les à-côtés. Il sait les tournois qu’il doit jouer comme Newport, un peu traquenard. Il aime bien ces tournois-là, je lui fais un petit clin d’œil ! (sourire). Je suis très admiratif de ce qu’il fait. J’espère aussi être un exemple pour les mecs qui ont 25-26 ans et qui pensent être vieux et en fin de carrière. Et bah non en fait !
Tu as encore franchi un cap dans la connaissance de toi-même et l’approche de ta carrière ?
Oui oui ! J’apprends à me connaître, savoir ce qui marche, comment me mettre dans de bonnes dispositions, ce que je veux autour de moi… L’expérience joue vraiment pour découvrir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
"Je me sens capable d’aller chercher le Top 30, voire mieux"
Quels vont être les objectifs pour 2024 ?
J’ai eu un best ranking avec une 48e place. Je me sens capable d’aller chercher le Top 30, voire mieux, si je ne me blesse pas. Je n’ai peur d’aucun tournoi ni aucun joueur. Ça me ferait plaisir de revenir dans le Top 50 puis aller chercher le Top 30. J’aimerais aussi remporter un match dans chaque tournoi du Grand Chelem. J’ai seulement gagné à l’Open d’Australie.
À Roland-Garros, tu étais proche de gagner contre Khachanov. Comment vois-tu ce match quelques mois plus tard ?
Je garde ça comme un moment phare de ma carrière. Le public français était en furie. J’en ai des frissons juste en y repensant. Ce match-là, c’était ma reprise. J’avais sept semaines en salle de kiné. Une semaine avant, Titouan Droguet se foutait de ma gueule parce que je ne mettais pas une balle dans le court. Je ne battais même pas un négatif. Avoir joué deux sets comme ça, c’était très positif. Je voulais juste profiter, car j’attendais ça depuis 10 ans.
Un titre ou une finale ATP, c’est dans la raquette ?
Je suis capable de gagner ou de faire une finale. Il faudra que les planètes s’alignent. Je suis lucide, je ne vais pas battre des Top 10 tous les jours. Mais quand je vois les joueurs qui ont déjà gagné, je n’ai rien à leur envier. J’y crois. Mais, ce n’est pas un objectif.
Vas-tu choisir des tournois en étant opportuniste ? En trouvant des tableaux dégagés ?
Non, l’année dernière, je voulais déjà jouer que des tournois ATP pour profiter et découvrir. Cette année, peut-être que je vais faire quelques challengers pour essayer de sécuriser ma place dans le Top 100. Le but, c’est quand même une prog qui me plaît et je n’ai pas envie d’aller en Chine ou je ne sais pas où pour des Challengers.
Constant Lestienne avait passé le premier tour de son premier Open d'Australie en janvier
Publié le par Alexandre HERCHEUX