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"Un Français gagne Roland-Garros !"

La fiction Fabrice David
Publié le par Fabrice DAVID

Fabrice David, vous connaissez et vous avez visiblement aimé ses fictions sur Tennis Actu... alors elles sont de retour ! Avec son expérience journalistique, 23 ans au service des sports de TF1, avec sa polyvalence (reportages pour les Journaux Télévisés de 13h et 20h, les émissions Téléfoot et Auto-Moto, les magazines autour des Coupes du monde de football ou rugby, LCI), avec son savoir faire (storytelling, mise en récit, création de contenu vidéo et écrit) mais aussi avec son style (écrivain de polars et d'un livre d'humour), voilà la chronique Fabrice David... sa fiction sur Tennis Actu.

 

Lorsqu’il lève la Coupe, le geste est maitrisé, fluide. Aucune émotion ne le submerge. Il ne voit pas le soleil qui baigne le Central et semble le saluer. Il n’entend pas les hurlements du public, hystérique d’avoir vécu ce moment, ce genre de journée dont on pourra dire à ses enfants, ses petits-enfants « j’y étais ». 

Car il s’y était préparé. Aussi surprenant que cela puisse paraître. 

Il ferme les yeux. Il gère ses pensées. Il a appris. Aucun adversaire, dans aucun jeu, aucun set, aucun match, n’a pris le dessus sur lui mentalement. Derrière ce visage poupin, cette mèche de cheveux châtains qu’il a peigné avant de monter sur le podium, ces yeux vairons (un vert, un marron) qui accentue encore la particularité de cet ovni du tennis, il est devenu plus qu’une coqueluche, plus qu’une curiosité, plus qu’un mystère, pendant ces trois semaines. Un nouveau héros. 

« Je suis ému, je ne sais pas quoi dire… »

Il ment un peu. Il se doutait. Angel Garrond, Français, joueur correct de 22 ans jusqu’à ces dernières semaines, issu des qualifications, s’impose à Roland Garros. Encore plus dingue que Kuerten, vainqueur en 1997. Que Söderling qui bat Nadal en 2009. 

« Je voulais remercier le public … »

Il ne s’enflamme pas, ne sort pas du discours traditionnel. Félicite Roger Federer, pour son retour à la compétition, réussi, malgré cette défaite en finale. Lui, comme tout le monde, a cédé contre l’ovni.

« J’ai travaillé dur, je remercie mon entraineur… »

Dans les tribunes, coincé sous une casquette, l’intéressé rougit à peine. Il n’est déjà plus là. Il prépare les prochaines séances, sur herbe, avant la quinzaine de Wimbledon. Il est le coach-mentaliste d’Angel. Qui a façonné le bloc de granit. Un cerveau. Qui l’a persuadé que c’était lui qui déciderait de ses victoires et de ses défaites. 

« Chaque point gagné par l’adversaire est un aveu de ta faiblesse. Car tu lui as donné une occasion. Je t’apprendrais à ne jamais donner l’occasion », lui martelait coach-mentaliste, jusqu’à ce que ça rentre au fond de son crâne. 

Angel se souvient de la première fois. Il avait huit ans. Toute la famille était réunie dans le salon au canapé bleu électrique. Sur la table basse, un paquet de chips. Angel aimait le tennis. En serrant dans sa main gauche une balle jaune pour se déstresser, il espérait que ses parents soient d’accord. Le discours de coach-mentaliste était comme un grand voyage. 

« Votre fils a une volonté hors du commun, pour son âge. Et une élasticité du bras et du poignet étonnante. Je lui fabriquerai un coup droit décroisé que personne n’a jamais vu. »  

Les parents d’Angel ont été séduits.  Même si un coup droit, ça ne suffit pas. 

« Il faut croire en ses rêves. Le mien, ce n’est pas d’arriver à haut niveau mais d’y rester, comme Roger l’a fait », dit modestement Angel Garrond, bien peigné, sur le podium du court Central.  

Le Suisse, toujours aussi élégant, sourit malgré sa déception, et remercie d’un hochement de tête. Angel se souvient qu’il y a un mois, jour pour jour, il a fait disjoncter une machine lance balles à l’entrainement, en exigeant un rythme toujours plus élevé, jusqu’à faire griller le moteur, le bras mécanique et les résistances de l’appareil. Il n’oublie pas qu’il y a trois semaines, le premier jour des qualifs, son coach-mentaliste l’a déposé une heure avant en Renault Kangoo devant la porte Suzanne Lenglen. Sur le court, il a regardé dans les yeux le Sud-Américain classé 174e en souriant. Il avait pris l’ascendant avant même le début du match.

Il s’est fait un petit nom en accédant au tableau final et il s’est fait un petit centième mondial au premier tour. L’autre ne savait faire que des coups droits, des revers, des services et des volées. Il ne savait pas briser. Angel Garrond, lui, savait. Par des coups décroisés étranges, des balles qui ne rebondissent pas.  Par un regard. Par une confiance en lui presque destabilisante. Par un jeu d’échec.

 

Décroisé-décroisé

Il l’a répété mille fois par jour, ce geste. Dès que ses parents ont accepté de le confier au coach-mentaliste, sur ce divan bleu électrique. Pendant toute son enfance, son adolescence, les hivers, les étés. Toujours plus vite, toujours plus fort. Angel et coach lui ont donné un nom, comme pour mieux l’apprivoiser : le coup droit « décroisé-décroisé ». Pas très académique ! De face, il frappe fort tout en ramenant le bras, quasiment à angle droit, le long du corps. Du coup, côté coup droit, en cherchant le long de ligne, le rebond envoie l’adversaire au-delà du couloir de double. Comme un effet d’amorti retro ! Coach-mentaliste a réussi à le convaincre, par l’hypnose, que pour gagner, dans le tennis moderne, il fallait inventer de nouveaux coups tant les joueurs aujourd’hui sont forts et complets. 

« Il reste une faille. L’effet de surprise. Le coup que les autres n’ont pas… »

Il est fort, coach-mentaliste. 

« Le muscle fléchisseur radial du carpe de mon poignet est une anomalie. Dix fois plus puissant et plus souple que celui d’un humain normal. J’ai une force alliée à une souplesse qui me permettent de sortir ces coups. Chez vous, cela provoquerait une torsion trop douloureuse mais chez moi, ce geste est devenu naturel … », a expliqué un jour Angel à une jolie journaliste avant de regretter d’avoir dévoilé un de ses secrets.

Il s’en est voulu mais il n’a pas pu contrôler les battements de son cœur, devant cette jeune femme, lui dont le cœur, d’habitude ne bat jamais vite, même pendant un match, même en cinq sets. Parce qu’il a un cœur très lent, qui a surpris de nombreux cardiologues et médecins du sport.

« En cinq sets, tu seras le meilleur, grâce à ton cœur » lui a dit coach-mentaliste. 

Heureusement qu’il n’affronte pas sur un terrain la jolie journaliste. 

Son coup droit « décroisé-décroisé » a tellement déstabilisé Popyrin, au premier tour du grand tableau, qu’il n’a pas eu besoin de sortir d’autres coups improbables de sa manche. Pourtant, il en a encore quelques-uns. 

« Les gars qui sortent des qualifs, c’est un piège ! Je ne le connaissais pas », s’est plaint l’Australien en conférence de presse pour tenter de se justifier.

Angel ne regarde pas, il perce. Il devine. Il tisse. Il enserre. 

« Who knows him ? »

Une pointe d’inquiétude dans la voix de John Isner avant le deuxième tour. Le géant américain commence à prendre goût à la terre battue après un joli parcours à Madrid et 103 aces réalisés sur la semaine avant de tomber contre Thiem. Ce n’est pas pour sombrer contre un illustre inconnu qui commence à devenir inquiétant !

« Qui le connaît ? »

Personne. Ou plutôt si… Les battus. Les trois en qualifs et Popyrin. Mais ils sont partis. Faut les appeler dans l’avion. Sauf qu’ils ont dû couper leurs portables, énervés. Car c’est très énervant, cette frustration de perdre contre un joueur qui n’est pas plus fort. Juste différent. 

Pas de réponses. Le vestiaire de Roland est muet. On y entendrait rouler une balle de tennis sur le sol.

Pendant l’échauffement, Isner n’a rien vu de spécial. C’est juste après, en servant. Ses premières balles revenaient encore plus vite. D’habitude, il fait au moins un service gagnant pas jeu. Là, rien ! Que des retours foudroyants ! 

Isner a fini par admettre l’impossible…. Ce Français voit ! Il sait ! Il devine, au moment de la frappe en extension, tout là-haut, où ira la balle. Donc il se place une seconde avant ! Et c’est cette seconde qui change tout ! Et il ne se trompe jamais ! Impossible de lui faire un ace. Il y est. Isner s’arrache le bras. Il y est encore. Cogne comme un sourd à en détruire un mur. Il y est toujours. 

220 km/h. 228… 230… Le public fait « Oh ! » Mais le Français est dessus. La balle revient. 

Angel Garrond en a bouffé des séances d’imagerie mentale. La gestuelle du serveur. La position de sa frappe. L’inclinaison de sa raquette. Son coup de poignet. Cela se joue au centimètre près. Il a exercé son œil pendant des heures, des jours, des mois. Comme un ordinateur qui écrit tout seul, il a accumulé les informations dans tous les millimètres carrés de sa mémoire et de sa rétine. Jusqu’à deviner, à 99%, là ou tomberait la balle dans le carré de service. Et donc le placement idéal pour renvoyer à l’envoyeur ! C’est devenu un réflexe. Premier set, deuxième set. Isner est vexé, frustré, presque humilié. Ce Angel Garrond marche dans son crâne. C’est drôle, hier dans le vestiaire, Djokovic disait « le Français qui sort des qualifs, paraît qu’il mange les cerveaux… » Du coup, Isner a mal dormi. Djoko avait raison. 

« Now, I know him » a dit Isner, battu et dépité en rentrant au vestiaire. 

Et il n’y a pas que l’Américain qui désormais le connaît. Tout Roland est abasourdi. Comment il fait ? D’où il vient ? Là, en l’occurence, il revient du court numéro 2. Il a écoeuré Marin Cilic. Le grand a dû aller chercher des balles qui rebondissaient à peine au-dela du couloir et quand il les remettait, le Français était déjà au filet pour conclure. Il en a eu marre, le croate. Quatre sets et il rentre en Croatie. 

Les journalistes courent, les supporters interpellent, c’est l’embouteillage dans les allées de Roland. Mais Angel de son œil vert et du marron, observe, ne dit rien. Toutes ces images, il va les digérer et les envoyer dans sa mémoire morte. Comme un disque dur, là-haut. Et il n’y pensera plus. Pour que l’esprit soit frais, neuf. Il efface l’euphorie autour de lui. Pas de pression.

 

Danse classique

Avant le quart de finale, il va danser, chambre 126 de l’hôtel Ibis de la Porte de Versailles. Il a poussé le lit, rangé son sac de tennis dans la salle de bain, ses paires de chaussures au-dessus de l’armoire. Pour faire de la place. Depuis des années, coach-mentaliste le fait danser. En vrai ! Quand il a dit à Angel, la première fois « on va faire de la danse classique », ce dernier a voulu appeler son père, la FFT, le ministère... Evidemment, il n’a appelé personne. Et il a compris. La danse pour apprendre les mouvements du corps. Et surtout, lire ceux de l’adversaire : sa gestuelle, l’harmonie de son bras, son placement, ses hanches, ses épaules. Au centimètre près, il sait comment le placement influera sur la trajectoire. Il s’est découvert des capacités mentales et visuelles hors du commun. 

Coach-mentaliste est fort, très fort.   

« Si l’adversaire fait un point gagnant, c’est que tu n’as pas bien regardé… »

Au premier set, contre Auger-Aliassime, il joue long, au centre. Jamais débordé. Puis il distille son coup droit décroisé-décroisé. Le Canadien s’agace. Mais s’accroche. Il trouve des diagonales. Angel les voit, les anticipe. Quand il perd un point, il l’oublie instantanément. Il n’est pas affecté. Il frappe au centre. Le Canadien l’observe, du coin de l’œil. Il ne parvient pas à prendre l’ascendant mental. 

Au deuxième set, Angel distille le coup droit « décroisé-décroisé ». Cette fois,  Auger-Aliassime s’énerve. Angel lui expliquerait volontiers, pour le muscle fléchisseur radial du carpe. Mais il ne parle pas canadien. 

Même au changement de côté, Angel regarde attentivement la démarche de son adversaire. L’autre se sent scruté. Mal à l’aise. Angel a laissé filer pas mal de jeux parce qu’il s’est surtout focalisé sur les jambes du blond. Sur la rotation de son bassin. Mais plus le match avance, plus il sait. Aucun coup droit, aucun revers de « FAA » ne peut désormais le surprendre. Il lit tout. Break dès le début du troisième. Il avait vu, avant même qu’ils ne quittent le tamis du Canadien, deux revers au centre, sans danger. A chaque fois, il est monté, une seconde avant au filet. Plus qu’à conclure, facilement. 

A deux sets à un, Angel sourit. Un œil vert et un autre marron brillent comme si la victoire ne faisait aucun doute.  Auger-Aliassime croise ce regard. Il n’aurait pas dû. Car ce regard l’obsède, l’agace. Il fait des fautes. Le Français est entré, lentement mais sûrement, dans son crâne, sous le bandeau pour lequel le Canadien a opté récemment à la place de la casquette.

« Tu n’as rien gagné, Angel. Ce sont eux qui ont perdu », affirme coach-mentaliste dans la salle à manger de l’hôtel Ibis. Angel est vexé. Il sait que coach le pique, exprès, mais il est vexé quand même. Il va lui montrer.

 

Anagramme

6-6 au premier set. Tie-break. En quart de finale, Carreno Busta jette un coup d’œil de l’autre côté du court. Ce Français bizarre est déjà en place, à attendre le service, les mains sur les hanches, genre « je suis prêt, ça vient ? » L’Espagnol ne comprend pas pourquoi ce genre de détail l’enerve. Et plus ça l’énerve, plus il s’en veut. En quelques secondes, avant de servir, il se pose trop de questions, se sent envahi par un corps étranger dans sa tête. Un coup d’œil à son entraineur, perdu au milieu du maigre public, format protocole sanitaire. L’Espagnol est déstabilisé. Son premier service sort d’un mètre.

« Faute ! »

Sur sa deuxième balle, il assure. En face, Angel Garrond renvoie un coup droit court et très lifté qui le déporte au-delà du couloir de double. Encore un coup de son étonnant poignet. La terre est humide après les averses du matin. Carreno Busta ne parvient pas à glisser correctement. Il est en retard, il le sent. Il boise, en se cassant le dos. Filet. Vexant !

Mini-break. Derrière, Angel est solide. Que des premières balles. Et le premier set. Mentalement, il l’a avalé. L’Espagnol veut finir les points trop vite. Les deux sets suivants, le Français ne fait que cinq fautes directes. C’est terminé. Dans le vestiaire, Carreno Busta croise, incrédule, Nadal qui vient de détruire Fabio Fognini. La présence de son compatriote lui fait du bien.

« No comprendo … »

Nadal ne dit rien. Juste un léger sourire. Qui signifie « T’inquiètes, je te vengerai. Je vais m’en occuper. »

En rentrant à son hôtel Angel Garrond appuie sur le bouton. En vrai, il n’appuie pas sur un bouton, c’est une image. Il déconnecte son cerveau. Nadal après-demain ? Il n’y pense même pas. Assis sur le grand lit, les rideaux transparents légèrement entrouverts pour laisser passer un rai de lumière qui lui caresse le visage, il se régénère. Cet exercice, il l’a travaillé avec un professeur de neurosciences. 

« Etre optimiste protège l’organisme », lui répétait le savant.

Il se purge de toutes pensées négatives, de toute pensée qui peut provoquer un doute.  Cela fait partie de l’entrainement, au même titre que les gammes, que l’alimentation, que la récupération. Les jambes en tailleur, les yeux mi-clos, Angel respire. Rien de ce qui lui arrive ne doit l’étonner, l’angoisser. Pensée positive. Angel bouge les lèvres.

« Mes échecs sont extérieurs. Ils ne durent pas. Mes réussites sont de mon fait. Un coup gagnant de l’adversaire ne me fait pas peur. Il me nourrit. » 

Coach-mentaliste est à côté, silencieux. Son poulain élimine les toxines mentales. Dans quelques heures, il sera nettoyé. Comme s’il n’avait pas disputé un seul match depuis plusieurs semaines. 

Nadal. Demi-finale.

« Son plus gros point fort ? Sa qualité et vitesse de déplacement. Donc il ne se déplacera pas… »

Il est très fort, coach-mentaliste. Mais il est complètement fou. Nadal ne doit pas bouger. Angel Garrond doit jouer sur lui. Il est prêt. Il est comme neuf. Il n’a pas d’émotions. Pas de pression. Pas de ressenti. Il a déconnecté des pensées parasites. Il joue au centre. Il joue au centre. Il rejoue au centre. Le cœur lent ne s’emballe pas. Chaque coup n’a qu’un objectif. Ne pas donner l’opportunité à Nadal d’un coup gagnant. Mais l’Espagnol frappe et imprime une incroyable puissance à la balle. Angel Garrond ausculte, lasérise, analyse l’immense champion, de l’autre côté du filet. Puis anticipe. Il joue au centre, devine, rejoue au centre, anticipe. L’Espagnol fat de moins en moins de points gagnants. Des millions de Français, dans leurs entreprises, dans la rue, au stade, chez eux, ont figé leurs gestes, leurs pensées. 

Il ne va pas le faire …  

« Nadal ne gagne pas de points. C’est toi qui les perds parce que tu ne le regarde pas… »

Il lui a dit ça, ce matin, coach-mentaliste. Angel scrute. Il devient Nadal. Il est son bras survitaminé. Il est sa jambe. Il est sa raquette. Plus aucune balle ne le surprend puisque c’est comme si c’était lui qui les frappait. La manière dont Nadal danse, Angel l’avait prévu, dans la chambre 126 de l’hôtel Ibis. Il lit tout. 

Un « décroisé-décroisé », quand le rythme imprimé par l’Espagnol devient insoutenable. Désormais, chaque point que gagne Nadal, Angel le digère. Il sait que cela ne durera pas. Chaque centimètre de la gestuelle de Nadal lui devient de plus en plus familière. 

Au troisième set, Angel sent que chacun des coups gagnants de Nadal est le dernier dans cette position. Qu’il ne se fera plus déborder deux fois de la même manière. Le treize fois vainqueur de Roland-Garros a compris qu’il doit se réinventer à chaque point. 

Angel revient à un set à deux. Il part avant à chaque fois. Les vagues de lifts surpuissants reviennent. Mais de moins en moins décisives. La France est debout comme un seul homme. Sur les plages, dans les voitures, dans les parcs, les canapés, les cuisines, les salons, les chambres… Nadal glisse au-delà du couloir. Angel Garrond joue du poignet. Il ne pense pas. Il a déconnecté ses émotions. Il observe le bras de Nadal. 

« La balle reviendra là. »

Dans quelques minutes, Angel n’entendra plus. Il ne se rendra pas compte. Il analysera le geste de Nadal qui enlève son bandeau, le visage fermé. Vaincu.  

Avant la finale, contre Federer, qui a tenté et réussi un magnifique « come-back », il se promet de ne pas oublier de féliciter le Suisse, après sa victoire. Il sait déjà que même Roger, le plus grand, le plus élégant, le plus fluide… Il sait déjà qu’en lisant les coups gagnants, l’autre ne peut pas faire un coup gagnat. Le raisonnement du coach-mentaliste est d’une logique implacable. Angel Garrond invente le mental de demain. 

Il mange un nouveau cerveau, en ce dimanche, devant la France hystérique et le monde éberlué, sous un soleil de plomb.

En conférence de presse, tout à l’heure devant des journalistes sonnés par la quinzaine qu’ils viennent de vivre, il leur dira. Aucun ne s’en est rendu compte. Son nom, Angel Garrond, c’est l’anagramme de « Gagner Roland ». Quand c’est écrit, y’a rien à faire, c’est écrit. 

Publié le par Fabrice DAVID

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