Tennis. Coupe Davis - Rétro 2002 : Youzhny a fait pleurer la France
Par Dimitri FORTIN le 25/11/2018 à 14:03
Le jeudi 16 août dernier, l'Assemblée de la Fédération Internationale de Tennis a voté la "réforme" de la Coupe Davis, compétition fondatrice du tennis, dont le charme résidait dans la possibilité de recevoir et de se déplacer à l'autre bout du monde pour décrocher le prestigieux Saladier d'Argent...
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Souvenir douloureux pour les passionnés de tennis en France que celui de la défaite en 2002 de la France en finale contre la Russie. Après la prestigieux succès de la "bande" de Nicolas Escudé, conquérante une année plus tôt, qui avait remporté le trophée à l'autre bout du monde en Australie. Emmenée par un Nicolas Escudé impérial, l'Equipe de France avait battu sur le gazon de la Rod Laver Arena les Wallabies de Lleyton Hewitt. Ce dernier était - fin 2001 - l'homme fort du tennis mondial, numéro 1, il a remporté l'US Open quelques semaines auparavant et s'est assuré sa place sur le trône du tennis mondial en remportant le Masters, avec une victoire en finale sur un certain Sébastien Grosjean... Mais le charme de la Coupe Davis est propice aux exploits les plus fous et Nicolas Esucdé en réalisera un grandiose en dominant Hewitt lors du premier simple, en cinq sets, 4-6 6-3 3-6 6-3 6-4. La tradition du double tricolore respectée, Cédric Pioline et Fabrice Santoro apportent le deuxième point en dominant Lleyton Hewitt encore, associé à Patrick Rafter, 2-6 6-3 7-6 6-1. Sébastien Grosjean vite battu par Hewitt, c'est Nicolas Escudé qui apportera le point du sacre contre l'expérimenté Wayne Arthurs, 7-6 6-7 6-3 6-3. Une victoire grandiose à l'autre bout du monde !
Un an plus tard, les Français reçoivent la Russie à Bercy pour défendre le précieux trophée glané à l'autre bout du monde. Une Russie emmenée par un joueur inoubliable lui aussi, Marat Safin. Une Russie dont le meilleur supporter est un certain Boris Elstine, l'ancien président de la Fédération de Russie, célèbre pour son fou rire avec Bill Clinton, mais aussi pour sa passion immodérée pour la vodka, certaines sources indiquant qu'il en consommait une bouteille par jour.... Un Boris Elstine tout feu tout flamme pour soutenir un conquérant Marat Safin, pour offrir une première Coupe Davis à la Fédération de Russie. Marat Safin est au top fin 2002, rappelons qu'alors le jeune joueur est troisième mondial, a disputé la finale de l'Open d'Australie en début d'année, perdue contre le Suédois Thomas Johansson. Rappelons aussi que le sommet de la carrière du Russe est ce fameux titre à l'US Open 2000, devenant le plus jeune numéro 1 mondial de l'histoire du tennis ! Ce jour-là, il avait balayé la légende Pete Sampras en finale, s'imposant 6-4 6-3 6-3.
Une équipe russe emmenée par le brillant Marat Safin, qui retrouve le POPB (Palais Omnisports de Paris-Bercy) après sa victoire quelques semaines auparavant au Masters de Bercy, mais aussi composée du vétéran Yevgeni Kafelnikov, âgé de 28 ans, nettement sur le déclin et titré deux fois dans les tournois du Grand Chelem, à Roland-Garros en 1996 et à l'Open d'Australie en 1999. Troisième joueur présent, un "petit jeune" qui monte, Mikhail Youzhny, qui a remporté son premier titre sur le grand circuit la même année, à Stuttgart, et qui s'est qualifié pour son deuxième huitième de finale de Grand Chelem de sa carrière, à Wimbledon. Quatrième joueur présent sous la direction du célèbre Samil Tarpischev, le modeste Andrei Stoliarov. Des Russes auteurs d'un beau parcours, où ils ont d'abord éliminé la Suisse 3-2, malgré une victoire très facile de Roger Federer sur Marat Safin, puis dominant la Suède sans trembler 3-0 (4-1 score final) et enfin en s'imposant 3-2 (3-1) contre l'Argentine, Marat Safin dominant une autre étoile montante du circuit, David Nalbandian, 7-6 6-7 6-0 6-3.
Côté français, le noyau dur de 2001, c'est-à-dire Nicolas Escudé, Sébastien Grosjean et Fabrice Santoro a été reconduit, Cédric Pioline à la retraite et Arnaud Clément blessé, c'est l'un des grands espoirs du tennis français qui vient compléter l'équipe, Paul-Henri Mathieu. PHM a réalisé une année de toute beauté, s'inclinant en cinq sets en 1/8ème à Roland-Garros contre André Agassi, alors qu'il menait deux sets à rien. Juste avant la finale, il a remporté deux tournois en salle, Moscou et Lyon. Symboliquement, rappelons qu'il est aussi le dernier joueur à avoir battu Pete Sampras, avant que celui-ci ne remporte l'US Open et de partir à la retraite, c'était à Long Island. Une quête de la conservation du Saladier d'Argent surtout marquée par une demi-finale remportée - à l'image des légendaires Mousquetaires - face aux Etats-Unis, dans le stade de Roland-Garros. Ce week-end du 20 septembre, les Français ont renversé l'Amérique de James Blake et d'Andy Roddick grâce à des Sébastien Grosjean et Arnaud Clément de gala ! Les Français avaient connu une grande frayeur en quarts à Pau, dominant la République Tchèque de Jiri Novak au terme du cinquième match et au terme d'une victoire de Fabrice Santoro sur Bohdan Ulihrach en cinq sets !
Les choses se passent un peu comme prévu sur la terre battue de Bercy lors de cette finale... Impérial, Marat Safin emporte Paul-Henri Mathieu en quatre sets - 6-4 3-6 6-1 6-4 - et Sébastien Grosjean, malgré une belle résistance du Français dans la troisième manche, 6-3 6-2 7-6 (9). Sébastien Grosjean tenant son rang contre un Kafelnikov dans le dur, avec une victoire très facile en trois sets, le double tricolore a encore un rôle décisif à jouer. Fidèle à sa réputation, formé par Nicolas Escudé - le héros de l'année précédente - et de Fabrice Santoro, il s'impose au terme d'une superbe bagarre contre Marat Safin et Yevgeni Kafelnikov, 6-3 3-6 5-7 6-3 6-4. Ce qui devait arriver arriva... C'est encore le cinquième match décisif qui décidera du vainqueur de la Coupe Davis en cette année 2002 !
Yevgeni Kafelnikov usé après son simple et le double, Tarpischev choisit de lancer dans le grand bain Mikhail Youzhny contre Paul-Henri Mathieu, un choc des jeunes - les deux hommes ont 20 ans - pour un cinquième match décisif... malheurs au vaincu ! Une rencontre a priori assez équilibrée, les deux joueurs ayant des classements assez proches, mais un petit avantage tout de même pour "Paulo" peut-être plus à l'aise sur terre battue. Le début de match confirme d'ailleurs cette tendance, le Français menant deux sets à rien - 6-3 6-2 - et se retrouvant à deux points de la rencontre dans le quatrième set. Mais la dramaturgie typique des matchs en cinq sets va en décider autrement, Mikhail Youzhny remportera cette manche 7 jeux à 5 et filera vers le succès dans le cinquième acte de toutes les peurs, devant un Palais Omnisports de Paris-Bercy médusé et des téléspectateurs qui l'étaient sans doute tout autant... Score final : 3-6 2-6 6-3 7-5 6-4. Un Paul-Henri Mathieu effondré est réconforté par ses partenaires, tandis que Boris Elstine célèbre la victoire avec l'équipe Russe qui porte en triomphe son héros du jour... Mikhail Youzhny. Une belle carrière suivra le Russe - titulaire d'un doctorat de philosophie rappelons-le - qui atteindra en 2008 le huitième rang mondial et décrochera 10 tournois sur le grand circuit dans sa carrière. Ce dernier vient d'annoncer qu'il mettrait un terme à sa carrière au tournoi de Saint-Petersbourg dans quelques semaines. Paul-Henri Mathieu mettra du temps à se relever de cette défaite, mais il deviendra un joueur extrêmement populaire dans le coeur des Français, personne n'oublie son match contre Rafael Nadal à Roland-Garros en 2006, ni sa victoire lors de son "retour" contre John Isner, toujours Porte d'Auteuil, entre autres...
Malgré la défaite, les héros vaincus seront reçus à l'Elysée par le Président Jacques Chirac, une défaite qui marquera le tennis français... Il faudra attendre 2017 pour que Lucas Pouille, au terme d'un cinquième match décisif là encore contre la Belgique, ramène dans l'Hexagone le prestigieux Saladier d'Argent !