Tennis. Roland-Garros - Djokovic : "Je fais des histoires de crocos ! "
Par Thibault KARMALY le 31/05/2017 à 19:37
Pour le moment, la vie est un long fleuve pour Novak Djokovic qui poursuit son chemin à Roland-Garros. Il a battu Joao Sousa sur le score sans appel de 6-1, 6-4, 6-3. Le Serbe, n°2 mondial, a retrouvé le goût du jeu du jeu et un niveau plus conforme à ses attentes qu'en début d'année. En conférence de presse, il est revenu sur son match du jour, où il s'est senti "mieux qu'au premier tour", et sur sa passion pour le tennis. Il a aussi expliqué comment il en est venu à faire appel à Andre Agassi, qui est son tout nouveau coach. Pour finir, il a évoqué ses larmes lors des Jeux de Rio : "Je ne pense pas que pleurer expose la vulnérabilité d'une façon négative mais d'une façon positive." a-t-il souligné. Retrouvez ci-dessous en integralité ses propos en conférence de presse.
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Une question, dans le troisième set, on dirait que vous alliez chercher quelque chose dans votre sac ... J'ai vu une vidéo sur Instagram, j'aimerais savoir sur quoi vous travaillez là-dessus.
C'était un peu bizarre. Je me suis un peu tiré quelque chose. Il m'a pris à contrepied. Mais vraiment rien de grave ! La deuxième question porte sur la vidéo sur Instagram. C'est un truc que je fais depuis 2 ou 3 mois. C'est une sorte de système qui permet d'améliorer les fonctions cognitives pour accélérer ses réactions etc., tout ça de façon ludique. Donc c'est assez amusant. C'est assez cool comme truc. Je ne ressens pas non plus une différence incroyable. Mais je fais partie de ces sportifs qui cherchent de tout-petits, même le plus petit pourcentage d'amélioration dans tout ce que je fais, et là je me suis dit que c'était quelque chose d'intéressant qui pourrait m'aider, parce que le tennis est un sport très dynamique. Tout se passe en une fraction de seconde, surtout quand on renvoie un service à plus de 200 km à l'heure. C'est le type de chose qui peut peut-être aider inconsciemment à améliorer le temps de réaction, les instincts, etc. Stéphane le fait aussi donc... Je baisse les espèces de tripodes et lui part à la poursuite de la couleur verte. Il adore ce jeu.
Qu'est-ce que tu as le plus aimé dans ta performance d'aujourd'hui ?
Plutôt le début du match. Un super premier set, où là j'ai fait à peu près tout ce que je voulais. À mi-chemin, deuxième set, peut-être jusqu'à la moitié du troisième, c'est là où je lui ai plus laissé croire qu'il pouvait remonter, donc il a commencé à jouer mieux. Et là j'ai peut-être un peu levé le pied et il a saisi ses opportunités pour bien courir sur le fond de court, de façon assez agressive, il aime la terre battue en plus. Quand on lui laisse le temps, il peut devenir dangereux donc j'ai évité de lui laisser trop de temps. Il s'est accroché, surtout dans le troisième set. Donc les choses étaient un peu plus tendues, au troisième set. Et les derniers jeux étaient bons, la façon dont j'ai commencé était bonne. Donc je me sentais plus à l'aise qu'au premier tour et c'est ce qui compte.
Novak, depuis 2 semaines tu essaies de recommencer à t'amuser en jouant au tennis, est-ce que tu y es parvenu ici, étant donné les changements dans ton équipe, le favori de ce tournoi ? Est-ce que tu réussis à prendre du plaisir ?
J'adore jouer, braiment pour l'amour du jeu ; que ce soit l'entraînement ou lors d'un match, quand on rentre dans le court sur un match officiel, évidemment la sensation est différente, parce qu'il y a la pression, il y a l'arbitre, il y a les points. Il y a tout une dynamique et tout un changement dans les énergies qui se déploient, parce que là chaque point compte. Quand on est à l'entraînement, c'est différent. D'une façon générale, oui, j'adore. Je suis encore un vrai passionné de tennis. Il faut garder la passion pour avoir la moindre chance de pouvoir jouer au plus haut niveau. Il faut être engagé à plein. Évidemment, il y a des jours qui sont moins bons que d'autres mais cela fait partie du sport. Je suis arrivé à un moment de ma vie où il faut savoir trouver de nouvelles façons de se motiver, de trouver de l'inspiration. Andre Agassi m'a rejoint. Un certain nombre d'autres changements m'aident à y parvenir. Je me réjouis toujours de ce que la vie peut mettre sur mon chemin. Je me sens encore jeune dans ma tête, dans mon corps aussi. Et je vais continuer. Et on verra bien où cela m'amène !
Q. Tu as parlé de peut-être un équilibre meilleur entre le tennis et le reste de ta vie personnelle. Tu as l'air plus confortable sur le court. Est-ce que tu crois que l'équilibre arrive ?
R. Merci, je le prends comme un compliment. Évidemment, chaque individu est différent. Moi j'essaie toujours d'être franc avec les autres, d'exprimer mes émotions, d'avoir une certaine franchise dans l'existence, d'éviter de faire semblant. Il y a des moments sur le court où j'exprime des émotions positives ou négatives. Il est important d'en avoir conscience. Il est important de canaliser cette énergie pour que cela devienne une énergie positive et utile. Tu as parlé du mot « équilibre » ; effectivement, c'est quelque chose que je recherche, surtout sur le court, avoir la bonne mesure de mon intensité de jeu. Une énergie agressive dans le sens positif du terme, c'est-à-dire qui vous permet de continuer, de tenir le coup. Mais aussi de la sérénité. Je crois que c'est un équilibre que tous les sportifs, pas seulement les tennismen, cherchent à atteindre. C'est quelque chose qui n'est pas facile à atteindre, il faut travailler dur, pas seulement physiquement, mais aussi mentalement. Cela prend du temps et demande de l'expérience. C'est aussi une question de confiance en soi, dans une large mesure. C'est ce que la vie nous impose à nous les sportifs, à nous les êtres humains : de nouveaux défis, de nouvelles façons de s'accepter, de s'améliorer de tourner les choses à notre avantage, d'évoluer ou juste de craquer sous la pression. Il y a toujours des moments où l'on craque, mais à long terme, il faut garder un bon état d'esprit.
Félicitations Novak ! Une des conversations, un des débats intéressants, c'est quand Brad Gilbert et Andre Agassi se sont rencontrés dans un restaurant à Rome et ont discuté, cela a mené à un partenariat très important. Toi aussi tu as eu cette conversation avec Andre. Est-ce que tu pourrais partager avec nous un peu, premièrement, ton sentiment ? Est-ce que tu dis "ce type a vraiment quelque chose, cela va marcher" ? Pourrais-tu nous dire de quoi vous avez parlé ?
La première conversation qu'on a eue, c'était au téléphone. Comme je vous l'ai déjà dit, j'ai demandé son numéro pour l'appeler. Il m’a toujours soutenu, y compris dans les moments où j'étais pas mal sous le feu des critiques, dans les 6 ou 7 derniers mois. Il a toujours parlé de moi de façon positive, ce que j'apprécie évidemment. Je voulais lui dire tout simplement. La conversation a duré environ trois-quarts d'heure. On a commencé à parler de tout et de rien. On ne réfléchit pas tellement avec son esprit. On a juste un feeling, on voit qu'il y a quelque chose qui s'enclenche de façon naturelle. Après on a juste pris le temps pour que cela évolue et que cela devienne la relation que nous avons aujourd'hui. Je lui suis extrêmement reconnaissant d'avoir pris cette place dans ma vie, personnellement mais aussi personnellement quand il est là ou pas là. Nous sommes toujours en contact, au quotidien. Il a tellement de sagesse à partager avec moi que je peux utiliser au quotidien. C'est génial, c'est un vrai honneur de travailler avec lui.
Maintenant que tu as un crocodile sur ton tee-shirt, est-ce que tu sais pourquoi on appelait René Lacoste « le crocodile » ?
Regardez, c'est mon crocodile ! Je fais des petites histoires de croco maintenant !
Est-ce que tu vas pleurer des larmes de crocodile après avoir achevé tes victimes ou seulement quand tu perds comme à Rio ?
Je ne sais pas comment prendre ce dernier commentaire... Mais c'est une fierté pour moi de travailler avec Lacoste, puisque c'est le patrimoine, c'est l'héritage de René Lacoste qui était un inventeur, un révolutionnaire, un vrai sportif. C’était quelqu'un qui aimait les gens. Son tennis et sa position dans le monde a changé beaucoup de choses dans la vie de beaucoup de gens. Etre ambassadeur d'une marque si populaire et qui existe depuis si longtemps est un grand honneur. Alors les larmes de crocodile... Je ne pense pas que pleurer expose la vulnérabilité d'une façon négative mais d'une façon positive. Les larmes à Rio, c'était en effet un des moments les plus difficiles de ma carrière, je n'avais plus la possibilité de me battre pour une médaille que j'aurais tellement aimé avoir. Quand on porte le drapeau de son pays sur le torse, c'est un immense honneur qui est difficile à décrire avec des mots. C'est quelque chose qui provoque énormément d'émotions en moi. Participer aux Jeux Olympiques est toujours très particulier. Qu'est-ce que je peux vous dire sur les larmes de crocodiles ? Je ne vais pas vous parler des alligators qui dévorent les victimes ; vous savez, moi, je ne fais que frapper les balles de tennis !
Est-ce que vous pouvez attendre ? Il faut que je fasse une photo de mon crocodile en conférence de presse ! Merci.