Tennis. ATP/WTA - Mouratoglou : "Révoltant que le 100e peine à gagner sa vie"
Par Aude MAZ le 10/04/2020 à 12:37
C'est l'un des sujets chauds du moment. Comment faire pour aider les joueurs au-delà du top 100 à survivre professionnellement à cette période. Tandis que des joueurs ou joueuse telle que Sofia Shapatava, des entreprises telle qu'Atton & Price tentent déjà de faire bouger les lignes, c'est au tour de l'éminent entraîneur de Serena Williams, Patrick Mouratoglou de se mêler au débat. Débat qu'il élargit volontiers aux inégalités financières dans le tennis en général, qui existaient avant le nouveau coronavirus et qu'il espère voir disparaître avec lui. L'homme d'affaires a publié une lettre ouverte sur son compte Instagram où il incite les dirigeants du tennis ainsi que les différents acteurs à se poser virtuellement autour d'une table avec de trouver des solutions.
Vidéo - Open d'Australie 2020 - Mouratoglou entraineur de Serena
"Notre sport est génial. Pourtant, la période difficile à laquelle nous sommes confrontés ne fait que souligner à quel point il est dysfonctionnel. Les joueurs classés en dehors du Top 100 atteignent à peine le seuil de rentabilité et la plupart d'entre eux sont obligés de financer leur carrière pour continuer à jouer professionnellement. Leur vie est une lutte financière. Contrairement aux joueurs de basket ou de football, les joueurs de tennis ne sont pas couverts par des salaires annuels fixes. Ce sont des entrepreneurs indépendants. Ils paient pour leurs voyages. Ils paient des salaires fixes à leurs entraîneurs, tandis que leurs propres salaires dépendent du nombre de matchs qu'ils gagnent. C'est un système basé sur la méritocratie - ce qui me convient parfaitement. Les meilleurs joueurs méritent à 100% leurs gains. Cependant, je trouve révoltant que le 100e meilleur joueur de l'un des sports les plus populaires au monde - suivi par environ un milliard de fans - soit à peine capable de gagner sa vie."
"Le tennis ne peut pas vivre seulement de son élite"
Bien sûr, le Big Three et les meilleurs joueurs donnent de la visibilité au tennis. Mais avant d'en arriver là, ils ont fait leurs armes sur le circuit secondaire. Ce circuit est indispensable à la progression des joueurs vers les sommets. C'est en tout cas ce que défend le technicien français dans son courrier :
"Certains abandonnent leurs rêves et l'appellent carrière. C'est le cas depuis trop longtemps. Bien que nous ayons supprimé la suprématie masculine établie de longue date dans le domaine financier, le tennis conserve l'un des niveaux d'inégalité les plus extrêmes dans tous les sports. Le fait est que le tennis en a absolument besoin pour survivre. Le tennis ne peut vivre que de ses elites. Le circuit serait atrophié. La réforme de l'ITF de l'année dernière, qui a heureusement été annulée quelques mois seulement après son adoption, a rendu la situation de ces joueurs hors du top 100 presque impossible à gérer. Beaucoup d'entre eux ont décidé d'abandonner le tennis simplement parce qu'il n'y avait pas d'autre option. Actuellement, ils sont confrontés à un nouveau défi: parce que le circuit est en pause pour les raisons que nous connaissons tous, ces joueurs ne reçoivent aucun revenu et, contrairement à la plupart des 100 meilleurs joueurs, ils n'ont pas d'argent de côté ou des sponsors pour vivre. Il est temps de penser à ces acteurs et de les aider, d'abord dans un avenir immédiat, puis sur le long terme."
"ATP, WTA, ITF, Grand Chelem doivent s'asseoir (virtuellement) ensemble"
Ce débat autour des inégalités dans le tennis n'est pas nouveau, mais dans l'intensité du circuit, il n'est pas toujours facile de prendre le temps de chercher de vraies solutions. Ce que demande Mouratoglou est simple : le tennis dispose actuellement de temps pour réfléchir en l'absence de tournoi alors il faut l'utiliser :
"Pour cette raison, je serais ravi de voir l'ATP, la WTA, l'ITF et les Grands Chelems s'asseoir ensemble (virtuellement) pour essayer de trouver une solution durable. Nous comptons tous sur ces organes directeurs, qui ont le pouvoir de protéger l’économie du tennis professionnel et d’assumer une responsabilité sociale. J'aimerais que ces institutions disent STOP. Nous ne pouvons plus laisser les joueurs de rang inférieur derrière. Ce n'est pas bien. Le tennis doit changer. Profitons de ce temps libre pour lancer une discussion".