Tennis. ITW - Muguruza : "Dominer le tennis, comme Serena"
Par Clémence LACOUR le 04/06/2016 à 21:26
Vidéo - Muguruza en conférence de presse
Garbine Muguruza voit la vie en rose sur ce Roland-Garros 2016. Vainqueure de la n°1 mondiale Serena Williams, elle est peut-être en passe de devenir une vraie Parisienne, comme avant elle son compatriote Rafael Nadal. Pour l'heure, sur le devant de la Seine Porte d'Auteuil, elle savoure ce trophée, conclu sur une superbe balle de match après quatre occasions manquées.
Sur le trophée, à quel est le nom à côté duquel vous aimeriez que votre nom soit inscrit aujourd'hui ? A côté de quels autres noms tu aimerais qu'il soit gravé ?
Un peu toutes. J'aime bien être à côté de Serena, bien sûr, puisqu'elle a gagné tellement de Grands Chelems, elle fait partie de l'histoire. Il y a Steffi Graf, combien de fois elle a remporté de victoires, de Grands Chelems. Un peu toutes, toutes celles qui ont gagné et qui sont gravées ici. Franchement, c'est génial d'être à côté de leurs noms
Avec ces 4 balles de match, vous avez dû servir après. À quoi avez-vous pensé ? Vous aviez l'air très calme, et je pense qu’en vous, ce n'était pas si facile que cela.
C'est vrai, c'était difficile, j'avais 4 balles de matches de mon côté que je n'ai pas réussi à passer. C'est une finale. On ne peut pas être déçu, on ne peut pas trouver une excuse en disant « j'ai 4 balles de match et une autre possibilité de servir ». J'ai essayé de servir en me disant : « ce n'est pas vrai, ce n'est pas possible ». J'ai réussi à garder mon calme. J'ai pensé que je devais me battre sur chaque balle et peu importe si c’est une balle de match ou de championnat. Je pense que Serena ne te donne jamais l'impression que tu domines le match. Elle est très puissante, elle a un service impressionnant, elle peut gagner rapidement des jeux. Je n'ai pas vraiment remarqué un point particulier mais il est vrai que j'étais au premier set. Quand on remporte le premier set, on se calme un peu, on se dit : "c'est bon, c'est bien parti". Mais je n'ai pas remarqué un point spécifique qui était un point tournant. Au moment de la balle de match, c'était étrange. Serena était devant la balle, et moi je ne savais pas si j'étais dedans ou dehors, je ne voulais rien dire. Tout un coup, le juge de ligne n'a rien voulu rien, ne l'a pas annoncée faute. En fait, au départ, il y a eu un petit moment de flottement et personne n’a osé nous dire que c'était bon. Beaucoup de personnes me posent la question : "qu'est-ce que je ressens ?". En réalité c'est une combinaison, un rêve devenu réalité. J'ai dit : « j'ai gagné, j'ai gagné ?!!! » Et quand il a dit « jeu, set et match », j'ai dit : « ce n'est pas vrai, j'ai gagné ! » et c'était fabuleux. C'est un tournoi que j'ai toujours voulu gagner. C'est une chose de faite sur ma liste. Je pleurais, je pleurais, et j'essayais de pousser et repousser mes larmes. Je me disais « attention ». J'ai pleuré. J'ai essayé de de garder mon sang-froid. J'ai commencé le tournoi, et je me suis dit : « je ne dois pas montrer mes émotions, quel que soit le tour. Je dois être calme ». Je ne savais pas quoi faire : sauter, me jeter par terre. C'est un moment où on a quasiment une crise cardiaque.
Vous avez battu maintenant Serena. Vous avez échoué contre elle en finale de Grand Chelem dernièrement. C'était un autre match. Qu'est-ce que vous avez appris de ces matches contre elle ? Qu'est-ce que vous avez réutilisé contre elle aujourd'hui ?
Il n'y avait pas que ce match. Tous les matches étaient importants. Je me suis dit : « j'ai des occasions que je peux prendre ». À Wimbledon, j'étais très nerveuse, je n'arrivais pas à contrôler mes nerfs. C'est difficile dans ces cas-là. Je me suis dit aujourd'hui : « mets cela de côté, vas-y, fonce et oublie, même si tu es nerveuse et que c'est difficile de le faire. » Et voilà ce que j'ai fait ! C'était un autre état d'esprit pour moi. (...) J'avais déjà entendu le commentaire de Patrick Mouratoglou, qui disait que le seul danger pour Serena c'était Serena. C'est un peu son job quelque part en tant que coach de Serena mais moi je n'entends pas, je n'écoute pas. Je ne suis pas d'accord. Moi, j'ai un tennis qui a dominé aujourd'hui et voilà, la preuve.
Vous êtes la 11e Espagnole à gagner un Grand Chelem. Quand vous y pensez, vous pensez que cette victoire va être une source d'inspiration pour les joueuses du Venezuela, où vous êtes née, et pour les autres joueuses espagnoles ?
Oui, j'espère servir de source pour les autres, quand les autres disent : « j'aimerais jouer comme vous, être comme vous », c'est bon d'entendre cela, notamment les jeunes, quand elles disent cela c'est hyper cool ! J'ai toujours pensé à cela, même si, bien sûr, je représente l'Espagne, je joue pour l'Espagne, mais pas que pour l'Espagne, pour moi aussi.
Vous êtes déjà n° 3 mondiale, c'était le cas en octobre l'année dernière. Vous n'avez gagné que 2 tournois dans votre vie. C'est difficile à comprendre pour nous notamment aujourd'hui. De plus, selon vous, quelle était la clé du point de vue technique pour gagner, on a parlé « émotions ». Les raisons techniques, quelles sont-elles ? Serena ne servait pas aussi bien que d'habitude et vous avez pris des initiatives ? C'est la clé du match.
Pour répondre à la première question, d'abord, je crois que les tournois importants sont ceux qu'il faut bien jouer, ce sont ceux qui comptent vraiment, ceux qui vous amènent au plus haut niveau de votre jeu. L'année dernière je me disais : c'est très bien j'ai fait une finale en Grand Chelem, j'ai gagné ce tournoi, etc. Cela gagne beaucoup de points, cela augmente votre niveau de jeu et c'est bien. Et la clé : j'ai un jeu très agressif, je cours sur tous les points, je n'ai aucun regret et je n'ai rien fait de particulier aujourd'hui, je crois. Je crois que j'ai beaucoup de confiance en moi, et comment expliquer cela... ? J'ai un état d'esprit d'attaque aujourd'hui. Voilà c'est ce qui a marché. Je pense que je suis quelqu'un d'ambitieux, quelqu'un qui a un fort caractère et qui aime les situations, les compétitions. Voir des courts qui sont remplis contre la meilleure joueuse, c’est ce qui me motive énormément. Je suis vraiment très contente de la façon dont je me suis démontré à moi-même cette capacité, je jouais très bien, comment contrôler mon stress et comment remporter la victoire contre une des meilleures joueuses du monde.
Y a-t-il quelque chose de votre tennis que vous souhaiteriez améliorer ?
En particulier ? Oui un peu de tout en réalité. Je pense que je dois franchement améliorer plein d'aspects de mon tennis. Voilà, j'y travaille. J'aurais pu servir mieux par exemple. Aujourd'hui, je n'étais pas très confortable. C'est d'ailleurs le seul coup qui dépend vraiment uniquement de soi. Il faut vraiment que j'y travaille. Il y a d'autres aspects également. Je suis contente bien sûr d'avoir gagne Roland-Garros mais j'aimerais encore plus. Mon rêve est de continuer de gagner des tournois de ce genre, puis dominer lorsque j'arrive sur le court, dominer le jeu et puis amener d'autres coupes comme celle-ci à la maison. Bien sûr, n° 1, tout le monde en rêve, tous les joueurs souhaitent être n° 1. Je ne me pose pas la question comme cela mais je me focalise pour gagner des matchs, des victoires, des tournois. J'aimerais bien sûr devenir n° 1.
Propos recueillis par la Rédaction de Tennis Actu à Roland-Garros