Tennis. Roland-Garros - Alexandre Müller : "Si je peux éviter Nadal ou Djokovic..."
Un premier huitième de finale en Masters 1000, une wild-card pour Roland-Garros et un retour dans la lutte pour un spot aux Jeux Olympiques de Paris. Alexandre Müller a vécu une semaine intense. Huitième de finaliste du Masters 1000 de Rome, le Provençal s'est offert durant son parcours son premier Top 10, Andrey Rublev, avant de voir son aventure prendre fin contre le Chilien Nicolas Jarry. La performance est superbe, surtout lorsque l'on sait que le joueur de 27 ans lutte contre la maladie de Crohn, comme il l'avait expliqué à Tennis Actu fin 2023. Vaincu mardi à Rome, Müller a reçu quelques heures plus tard un sacré lot de consolation : une wild-card pour Roland-Garros.
Vidéo - L'ENTRETIEN Alexandre Muller avec Tennis Actu
Meilleur Français hors cut grand tableau, l'actuel 109e mondial avait en réalité la garantie de recevoir une invitation au mérite. De retour dans le Top 100 lundi, le guerrier Müller a accordé un entretien à Tennis Actu ce jeudi. L'occasion d'évoquer son désir d'aider les jeunes atteints de la même maladie, ses ambitions pour Roland-Garros, et le rêve des Jeux Olympiques... Huitième meilleur Bleu de la Race Olympique, le protégé de Xavier Pujo est dans le coup pour faire partie des quatre Français qui joueront le tournoi olympique en simple. Il faudra briller à Lyon la semaine prochaine mais aussi à Roland-Garros. Personne ne l'a vu venir mais le voilà sérieux candidat à une place à Paris 2024. L'ENTRETIEN Alexandre Müller.
"Je serai tableau final à Wimbledon et ça me remet dans la course pour les JO"
Alex, ton superbe parcours à Rome a pris fin mardi en huitième. Que ressens-tu après cette folle semaine ?
C’était un super tournoi. Si tu m’avais dit avant le tournoi que j’allais faire un huitième en Masters 1000, j’aurais signé tout de suite. Même si je reste sur ma faim sur le dernier match où j’ai joué un gros serveur (Nicolas Jarry) et où je n’ai pas pu m’exprimer, c’était un très bon tournoi. Je retrouve le Top 100, j’ai assuré le cut de Wimbledon normalement. Je suis très content.
C’est une surprise totale ?
Totale non… Je sais que je joue bien et que je m’entraîne bien. Après, je n’avais jamais fait mieux que deuxième tour en Masters 1000 et là je fais un huitième donc c’est une petite surprise mais pas un exploit gigantesque.
Raconte-nous un peu la victoire contre Rublev, ton premier succès contre un Top 10.
Je savais qu’il y avait potentiellement un petit truc à faire. Il avait été un peu malade les jours d’avant. Il avait fait un gros match contre Giron. C’est aussi un des plus gros guerriers du circuit. Il s’énerve sur tous les points. Je voyais une brèche mais je savais que ce serait dur. Je me suis fait marcher dessus au début et j’ai su corriger des petits trucs et faire un gros match pour le battre.
C’est une étape de franchie dans ta carrière ?
C’est surtout une case de cocher. Victoire sur un Top 10, c’est fait. C’est super. C’étaient surtout les points qui comptaient pour moi. Normalement, je serai tableau final à Wimbledon et ça me remet dans la course pour les JO.
Il peut y avoir un avant et un après Rome ?
Chaque semaine est nouvelle. Ça ne veut pas dire que je vais bien jouer à Lyon. Je vais devoir garder le cap et essayer d’être en forme sur le plus de semaines possibles, comme à Rome.
Biggest win of his career ðŸ‘
— Tennis TV (@TennisTV) May 13, 2024
The moment qualifier Alexandre Müller took out number 4 seed Rublev in Rome!#IBI24 @InteBNLdItalia pic.twitter.com/Qfq6Q6j5Yl
Sur la maladie de Crohn : "J’ai reçu plein de beaux messages. Je suis content d’en parler, ça aide"
L’exploit est colossal aussi, quand on sait que tu dois faire face à la maladie de Crohn, comme tu l’avais expliqué à Tennis Actu en décembre. Est-ce que ça te rassure de te dire que, même avec cette maladie, tu peux rivaliser vraiment avec le sommet du tennis mondial ?
Le format rallongé en Masters 1000 me laisse un jour de repos et je peux bien récupérer. En Grand Chelem, c’est plus difficile. Si en Australie je joue cinq sets, mon corps a du mal à récupérer avec mes problèmes d’hydratation. Là, en Masters 1000, je peux récupérer et enchaîner. J’ai reçu plein de beaux messages. C’était la semaine de la journée mondiale des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin, dont la maladie de Crohn fait partie. Ça tombait à pic. Je suis content d’en parler, ça aide.
Est-ce que le symbole est dans un coin de ta tête ? De montrer à des plus jeunes qui ont aussi cette maladie que c’est possible de vivre des grands moments, de s’épanouir, et de viser haut ?
Quand j’arrêterai, je pense en parler, faire des genres de conférences pour aider. C’est surtout dans la tête cette maladie. On m’a dit à 13 ans d’arrêter le tennis. Au final, je me porte bien. Tous les jeunes qui me regardent et jouent au tennis, ça leur donne espoir et c’est top !
Donc tu ne regrettes pas du tout d’en avoir parlé ?
Non non, ça fait partie de moi. Ce n’est pas une excuse quand je perds. C’est contraignant mais je fais de mon mieux, tout simplement.
Pourquoi ça te tient à cœur de t’engager ?
Je sais qu’il y a des grades différents. Des enfants sont à l’hôpital pendant une crise. C’est assez touchant de voir des jeunes qui ne savent pas ce qui leur arrive. Ça me tient à cœur d’aider les gens et si je peux donner de l’espoir, c’est tout benef’.
Tu es surpris par la bienveillance depuis que tu en as parlé ?
Je n’ai pratiquement pas vu de messages négatifs, c’est vrai. Seulement des messages d’encouragement. Je ne suis pas une star donc ça n’a pas fait le buzz non plus. Le peu de personnes qui ont vu les articles m’a encouragé.
Alexandre Müller avec Tennis Actu fin 2023
"Si ça pouvait être ma première victoire à Roland-Garros cette année, ce serait cool"
Roland-Garros… Tu as été chercher une wild-card au mérite, en étant le meilleur Français hors cut. C’est une fierté ?
Quand on sait à quel point c’est difficile d’avoir une wild-card, j’étais content de l’assurer avec un règlement. C’était un soulagement. C’était cool. Ça s’est fait sur les dernières semaines. Tout se goupille bien donc il faut en profiter.
Après cette belle semaine, les ambitions sont plus hautes ?
Ça me donne de la confiance et de l’envie. Les ambitions à Roland n’ont pas vraiment changé. C’est toujours d’aller le plus loin possible. Par contre, ça donne plus de confiance oui.
Tu en rêves d’aller chercher une première victoire dans le grand tableau de Roland ?
Ouais… Je n’ai pas encore gagné en grand tableau de Roland. C’est étrange car c’est la surface que je préfère. J’ai déjà gagné à Wimbledon et en Australie donc si ça pouvait être la première à Roland-Garros cette année, ce serait cool.
Tout dépendra aussi du tirage…
C’est marrant car on en a parlé avec mon équipe. Je pouvais jouer Rafa à Rome et ça m’attirait. Jouer Rafa sur terre, c’est quelque chose. J’ai joué un joueur plus prenable, Fucsovics, et j’ai pu aller en huitième. L’an passé, j’ai eu des gros morceaux en Grand Chelem donc si je peux éviter Rafa ou Novak au premier tour… (Müller avait joué Sinner à Roland-Garros, Alcaraz à Wimbledon, et Djokovic à l'US Open en 2023)
Tomber sur Rafa à Roland-Garros, ce serait un grand moment quand même ?
Je ne sais pas à quoi m’attendre. Sur son niveau, s’il joue, il sera prêt. Rafa à Roland, c’est Rafa à Roland ! (sourire). Mais le public, je ne sais pas s’ils seront pour moi en tant que Français, ou pour lui…
C’est quoi le Roland-Garros rêvé ?
Une deuxième semaine !
Tu as évoqué les Jeux olympiques. La Race olympique a toujours été dans ta tête ?
Ça vient quand ça devient possible en début d’année. J’ai eu un trou pendant la tournée américaine et le début sur terre. Je me suis retrouvé loin donc ça m’était sorti de la tête. Là, ça revient sur la table. Je suis dans la course donc j’y pense. Ça ne prend pas non plus une place à me mettre de la pression. Si je n’y vais pas, ma vie sur le circuit ATP continuera… J’aurais tout fait pour, sans aucun regret.
Ça représente quoi les JO pour un joueur de tennis ?
Ça reste mythique, surtout cette année à Paris. S’il y a des JO à faire pour un Français, c’est ici. Peut-être que la motivation baisse pour ceux qui ont déjà joué des JO. Ce n’est pas mon cas donc ma motivation est énorme, surtout en France et sur terre battue.