Tennis. ITW - Geoffrey Blancaneaux : "Je ne voyais plus d'échappatoire !"
Par Alexandre HERCHEUX le 28/12/2021 à 18:24
Persévérant : voilà une qualité qui définit très bien le Tricolore. Tout à sa joie d'avoir décroché le premier Challenger de sa carrière, dimanche dernier à Maia, sa plus belle prise depuis son titre Roland-Garros juniors en 2016, Geoffrey Blancaneaux savoure sa 235e place mondiale, son best ranking. Dans un post sur Instagram, il a remercié "ceux qui sont à ses côtés depuis de longues années. Place à quelques jours de vacances avant d'attaquer la préparation de l'Open d'Australie." Depuis quelques mois, il a intégré la Fondation belge Hope and spirit. C'est Xavier Legall qui l'accompagnait au Portugal. Le joueur de 23 ans a été méritant cette année. En début de saison, il avait fait un voyage pour rien en Australie avant d'être à l'isolement pendant 10 jours au Portugal en avril. Courageux, le Frenchie a été récompensé en cette fin de saison. Pour Tennis Actu, Geoffrey est revenu sur son titre à Maia mais aussi sur sa saison 2021 et ses ambitions en 2022.
Vidéo - Geoffrey Blancaneaux évoque son 1er titre en Challenger
"Ce titre a été un soulagement (...) C’est beaucoup d’émotion"
Quelques jours après avoir décroché à Maia ton premier titre en Challenger, comment tu te sens ?
Je me sens très heureux et très épanoui d’avoir remporter un premier Challenger. C’est beaucoup d’émotions. Le déclic, ça a été le WO en quarts. Je n’avais jamais réussi à passer en demies. J’ai saisi l’opportunité que j’avais de jouer cette première demie puis la finale.
Comment l’as-tu vécu ? Un soulagement ? Une fierté ? Ça te donne encore plus faim ?
Ça a été un soulagement. J’ai appris le WO à l’échauffement et à partir de là j’ai ressenti un soulagement d’être en demies. Ce n’était pas une finalité et on a préparé au mieux les deux autres matchs.
Tout cela se joue aussi sur des détails. Fait amusant, tu as failli manquer le tournoi au Portugal.
Je partais d’Italie avec mon coach. On a fait Turin-Paris. Arrivé à Paris, nous étions vaccinés mais nous n’avions pas de tests PCR de moins de 48h. On est refusés. Soit on n’y allait pas, soit on payait les prix des billets et on y allait, soit j’y allais seul. On a beaucoup réfléchi et on a décidé d’y aller coûte que coûte.
Ça ressemble à un signe ?
Oui voilà. A partir du moment où on arrivait à Porto, on s’est dit qu’on n’avait rien à perdre. On était sorti d’une grosse galère donc je jouais pour le plaisir. Si tu t’accroches et ne te plains pas, ça fait des belles choses.
Le début de la saison avait en plus été compliqué avec un voyage pour rien en Australie puis 10 jours d’isolement en mars, il a fallu être costaud pour laisser tout ça derrière ?
Le début de saison a été particulier. On a tenté l’Australie mais je suis resté en dehors. C’est vrai que ça fait mal au moral. En plus, peu de victoires. Le peu de tournois que je fais, je joue Rune (NDLR: à Bressuire) ou Bonzi au premier tour. Il fallait juste travailler dur et saisir sa chance. J’ai réussi à bien jouer en début d’été pour grappiller des points et entrer dans les tableaux.
Quel bilan dresses-tu de ta saison ?
J’ai rempli mes objectifs à court-terme. Je sais que je progresse. Je suis plutôt sur la bonne voie et je dois répéter ça plusieurs fois et ramener des trophées.
"Je ne voyais plus d’échappatoire (...) J’avais pensé à arrêter, même plusieurs fois"
Tu as expliqué que tu avais pensé à arrêter à un moment donné ? Qu’est-ce que tu te disais à ce moment-là et c’était à quelle période ?
Je pense que ça s’est passé pour tous les joueurs. On a tous cette pensée lorsqu’on ne se sent plus progresser. Je ne voyais plus d’échappatoire. On se dit qu’il faut peut-être faire autre chose. Ce n’est pas une défaite de se dire qu’on a échoué. Ce n’était pas la joie sur le court et dans ma vie en dehors. J’avais pensé à arrêter, même plusieurs fois. Tu rencontres de nouvelles personnes, de nouveaux amis, qui te donnent de nouveaux axes de travail.
Des amis sur le circuit t’ont aidé ?
Oui quelques amis proches sur le circuit et surtout en dehors qui m’ont aidé à voir autre chose que le tennis et me redonner le tennis.
As-tu pensé à ce que tu aurais fait en dehors du tennis ?
Oui… Je serais resté dans le monde du sport. Je n’avais pas de but précis. Je pouvais reprendre mes études aussi.
Tes difficultés, tu les expliques comment ? Un souci de choix ? Pas la maturité suffisante à l’époque ?
Après Roland, je n’étais pas le mieux préparé. J’ai eu des bons résultats sur le circuit Future mais je n’étais pas prêt pour le haut-niveau. Je n’étais pas le mieux entouré dans ma cellule proche. J’ai pris des mauvaises décisions, des blessures et à la fin tu perds du temps et tu stagnes. Ça a été le cas deux trois ans.
Tu étais de la génération Félix Auger-Aliassime (NDLR: battu par Geoffrey en finale de Roland-Garros juniors 2016), est-ce qu’on regarde ces joueurs-là en se disant : « Ça pourrait être moi. » ?
Oui honnêtement, on regarde les résultats de tout le monde. Lui a réussi à progresser mais chacun sa route. Le but c’est d’arriver en haut, peu importe l’âge et les moyens.
Qu’est ce qui est différent entre le Blancaneaux de 2017 et la version 2021 ?
J’ai appris sur moi-même et ce qu’est la vie sur le circuit. Maintenant, avec 5 ans sur le circuit, on voit la gestion des matchs et des tournois. J’ai mûri mais ma personnalité n’a pas changé.
Voir Cameron Norrie, Benjamin Bonzi, Arthur Rinderknech, éclore un peu plus tard, ça t’a donné un coup de boost.
Ça me confirme dans l’idée que j’avais du tennis. Benjamin, c’est un peu mon profil. Ça montre que chacun a sa route et tant qu’on y croît et qu’on travaille pour, c’est possible.
"En 2022, au moins me qualifier une fois sur l’un des quatre Grands Chelems"
Quand on avait échangé en début d’année, tu m’avais dit que tu en avais marre de dépendre des invitations, là tu vas pouvoir jouer l’Open d’Australie grâce à tes perfs et à ta 235e place, sans dépendre de personne. J’imagine que c’est une belle fierté ?
Oui, c’est mon but de l’année. Je voulais arrêter de demander à des gens et faire les choses par moi-même. Ça me permet de faire les Grands Chelems en le méritant et en ayant prouvé que j’ai le niveau. Comme beaucoup, quand on est entre 250 et 300, on se pose la question de savoir si on aura wild-card à Roland. C’est un poids en moins. C’est une bonne chose.
Est-ce que la gêne est seulement dans ton esprit ou aussi parce que les autres montraient de l’agacement par rapport à toi ?
On sait que les wild-cards sont très attendues. Tous les mécontents se font un jugement sur les autres. Je ne l’ai pas eu cette année mais honnêtement je n’avais pas le niveau, je le sais.
Les esprits sont tournés vers l’Australie maintenant. Il fallait le vaccin. Toi, c’était particulier parce que tu as été touché en début d’année.
Juste après avoir été positif, j’ai demandé une dérogation pour au moins avoir une première dose. J’ai été vacciné et j’ai eu ma deuxième dose hier.
Tu ne t’es jamais posé la question concernant le vaccin ?
Oui voilà. Je ne suis pas pour ou contre. C’est juste que je savais que ça aurait des avantages sur les tournois. Tant que je ne suis pas diminué, ça me va.
Quel est ton programme en Australie ?
Je pars le 28. Je démarre en Challenger. Je vais à Bendigo. Après l’Open d’Australie et après on verra. Je vise le grand tableau en Australie, je me sens capable de me qualifier. On avisera en fonction des résultats.
J’imagine que tu as un œil sur les Challengers en France ?
Oui oui c’est une possibilité. C’est très relevé. Si je veux entrer top 200, il faudra peut-être aller un peu plus loin.
Quels vont être les prochains objectifs maintenant ?
Au moins me qualifier une fois sur l’un des quatre Grands Chelems.
Et en termes de classement ?
Oui, un top 200, ce serait une très bonne nouvelle pour moi. Ça peut aller très vite, je le sais. Top 200 serait une bonne chose de faire, c’est clair.