Tennis. Roland-Garros - Bacsinszky : "Federer m'a fait chialer 18 fois"
Par Thibault KARMALY & Emmanuel POTIRON le 07/06/2017 à 13:15
Qui aurait misé sur elle avant même que ne commence ce Roland-Garros ! Bien peu de monde alors que, pourtant, Timea Bacsinszky avait jouée en 2015 les demies de Roland-Garros. Trois ans plus tard, voilà la Suissesse de nouveau en demi-finales des Internationaux de France après avoir éliminé ce mardi la Française Kristina Mladenovic au terme d'une journée marquée par deux interruptions par la pluie. La Suissesse a battu la Française en quart de finale après 1h49 de match (6-4, 6-4). Pour sa 2e demi-finale à Paris, la Suissesse affrontera, contre toute attente, la Lettone Jelena Ostapenko, vainqueur de Caroline Wozniacki (4-6, 6-2, 6-2).
Vidéo - Roland-Garros - Timea Bacsinszky au micro de Tennis Actu
En conférence de presse, Timea Bacsinszky était forcément tout sourire. "La fougue revient toujours pour moi quand je suis ici à Roland-Garros. Il se passe vraiment un truc spécial à Roland-Garros. Déjà, c'est le seul Grand Chelem où je n'ai jamais perdu au premier tour. J'apprécie chaque instant passé ici à Roland-Garros. Ma prochaine adversaire, Jelena Ostapenko ?
Je la connais bien puisqu'on ajoué ensembl en double. Oui, c'est vrai, nous avons la même date d'anniversaire. C'est le 8 juin, le jour de notre demi-finale. Heureusement pour elle, elle est bien plus jeune que moi. Elle va avoir 20 ans alors que moi, j'en aurai 28. Mais avoir plus d'expérience m'aidera peut-être. Nous avons souvent joué en double ensemble. Elle est très rigolote. Elle a la fougue de la jeunesse et ne semble pas céder à la pression. Peut-être qu'elle la boit, je ne sais pas. Bref, Jelena Ostapenko frappe bien et elle est joue un beau tennis. Ce ne sera pas un long fleuve tranquille et je sais que ce sera un match difficile à jouer."
Félicitations ! C'est votre deuxième demi-finale maintenant à Paris, et il n'y aura pas Serena Williams. Ca aidera ?
Oui, je pense que ça va aider largement. Je pense que l'expérience que j'ai eue il y a deux ans, quoi qu'il arrive, cela m'a beaucoup aidée. Cela m'a fait me remettre en question beaucoup de fois pour avancer encore, pour avancer plus ou mieux dans l'effort à certains moments, mieux gérer certaines tensions. Comprendre aussi certaines choses, que je ne comprenais peut-être pas il y a deux ans. Et, de toute façon, je veux dire, ce sera quoi qu'il arrive un match super intéressant pour cette demie. Mais je pense largement que mon expérience d'il y a deux ans va m'aider. Et pour la deuxième partie de la question, je veux dire, peu importe le nom de mon adversaire, que ce soit Serena Williams, tu aurais pu mentionner Maria Sharapova aussi ou mentionner n'importe qui d'autre, là, je ne parle que des deux joueuses qui ont été le plus mentionnées par rapport à leur absence ici, mais, du moment que tu es en demi-finale, j'estime que la joueuse que tu vas jouer, quoi qu'il arrive, elle sera extrêmement forte et a largement mérité sa place en demie. Ce n'est pas pour rien que c'est son nom et pas un autre ! L'adversaire qu'elle a battue aujourd'hui, elle l'avait déjà battue trois fois, je pense qu'elle ne voulait pas laisser sa place non plus en demi-finale. Et Wozniacki a fait aussi énormément de finales de Grands Chelems. Elle a une expérience plus grande que la mienne et plus grande que Ostapenko aussi et malgré tout, elle a été battue aujourd'hui.
J'ai un énorme respect, et aussi, je ne sous-estime absolument pas, au contraire, vraiment, je pense que c'est le mot respect que je vais retenir pour l'adversaire, les filles qui vont le plus loin possible dans les tournois. Notamment mon adversaire qui est très jeune, et malgré tout ça, elle est aussi loin. Ça veut dire qu'il y aura vraiment un match difficile pour moi.
Pouvez-vous décrire cette adversaire ?
Elle a cette fougue de la jeunesse qui est absolument fantastique. Elle est très, très drôle. Elle est rigolote. J'ai adoré jouer le double avec elle, parfois je voulais aussi me tirer les cheveux ! Parce que cette fougue de la jeunesse qui est assez... Bah ! Je ne l'ai plus ! Non je ne l'ai plus ! J'ai 8 ans de plus, je ne l'ai plus ! Quoiqu'à Roland, elle revient cette fougue. Elle a des frappes très solides, un timing fantastique. J'ai l'impression qu'elle, du coup, elle a... Je ne la ressens pas très... Comment dire, anxieuse.
C'est marrant, c'était pareil en double, quand je jouais à ses côtés, j'avais l'impression qu'elle a très peu d'anxiété. Je me suis déjà dit, du moins posé plusieurs fois la question, l'a-t-elle vraiment ou pas, l'ayant vu jouer plusieurs fois, plusieurs de ses matches. L'année passée, quand elle a joué en finale à Doha contre Carla Suarez Navarro, j'avais suivi le match et à plusieurs moments, je me suis dit : elle, elle ne sent pas la pression ! Peut-être qu'elle la boit ! Je ne sais pas... Sérieusement ! Et ça, c'est tout à son honneur. Et je pense qu'elle est très forte au service aussi. Je pense que c'est une joueuse très complète. On se complétait aussi très bien en double, je sais que ça ne sera pas un long fleuve tranquille !
Timea, je peux m'imaginer votre plus grand vœu pour votre anniversaire... Est-ce que cette journée vous a déjà porté fortune ou quelque chose de spécial ?
Oui, mon premier match professionnel, je l'ai fait à Hallebaddel le 8 juin, je me suis fait deux claquages, un à chaque cuisse. C'était 2/5, et j'ai dû abandonner. Donc voilà... Je continue ou pas ?! Je n'ai pas d'autre souvenir particulier, à part ce jour-là, par rapport à mon anniversaire. Mais, je ne sais pas, peut-être l'occasion de créer un nouveau souvenir est là. Je pense que c'est pareil aussi pour mon adversaire évidemment. Elle a un anniversaire plus important que moi, ce sont ses 20 ans, elle a enfin un 2 devant. Moi, 28, on s'en fout, ce n'est pas encore 30 ! Il aura peut-être plus d'importance pour elle que pour moi ! Mais malheureusement, je n'ai pas d'autre gossip sur l'anniversaire...
Contre Ostapenko, quel type de match attendez-vous ?
Je pense que... S'il te plaît, ne me dis pas "vous", il faut que tu me dises "tu", c'est la seule correction que je te fais ! J'attends un match très serré, j'imagine. Je pense qu'il y aura beaucoup, beaucoup d'émotion que ce soit pour elle ou pour moi. Je pense que tennistiquement, ce sera un match très intéressant, parce que je sais que c'est une fille, comme je le disais avant, dont j'ai l'impression qu'elle n'est pas extrêmement tendue durant ses matchs. Elle n'est pas très anxieuse.
Cela sera à moi de faire en sorte qu'elle le devienne d'une certaine façon. Peut-être jouer sur mon avantage tactique, sur mon expérience. Je sais que la fougue de la jeunesse peut être à son avantage aussi, je suis au courant de ça. Je connais très bien Anabel Medina Garrigues qui l'entraîne, et qui me connaît très bien tactiquement parlant. Je n'ai jamais battu Anabel pour l'instant, et je ne sais pas si je vais pouvoir la battre, vu qu'elle ne joue plus le simple. Je m'attends à ce qu'elle soit extrêmement bien préparée, et puis, je vais en faire de même, mais, en tout cas, je vais y laisser tout mon cœur, toute mon âme, pour essayer de remporter le dernier point.
Timea, vous êtes gâtée en Suisse, évidemment, avec Stan, Roger, Martina Hingis...
Cela vous blase ? Vous êtes blasés...?
Envieux ! En quoi Roger Federer vous a-t-il inspirée ? Je parle de Roger, mais ça peut être Martina Hingis ou Stan Wawrinka.
Les trois ont une inspiration différente pour moi. Roger, c'est celui qui m'a fait le plus chialer de tous. 18 fois quoi ! (Rires.) C'est tellement d'émotions. Il est tellement communicatif par rapport aux émotions. Oui, je suis très réceptive aussi à l'émotion dans le sport. Et ça, d'ailleurs, dans tous les sports.
Martina, j'en ai longuement parlé aussi, elle le sait aussi, au tout début, c'était un énorme fardeau pour moi. Vu que j'étais extrêmement comparée à elle, cela aurait été normalement complètement différent peut-être si elle n'avait pas eu la carrière exceptionnelle qu'elle a eue et qu'elle a encore. Réussir tout trop vite, et puis après, être tout le temps non-stop comparée à elle, c'était très compliqué pour moi. Mais, c'était un honneur aussi. Maintenant, je l'ai compris. Mais à 16 ans, on ne le ressent pas de la même façon.
Et puis, par contre, maintenant, c'est une copine absolument extraordinaire. On a vécu tellement de choses ensemble. Je pense qu'elle est aussi cash que moi dans ses réponses, et même peut-être plus je dirais... Nous avons beaucoup, beaucoup d'amour et de respect l'une pour l'autre. J'ai de nouveau eu un message sur mon casier. Je ne sais si vous avez suivi, lors du dernier match, j'ai eu une petite note de Martina, j'en ai eu de nouveau une, je vais prendre une photo. On a eu beaucoup de complicité, et en commun, on a vécu un rêve ensemble, il y a un peu moins d'une année, qui était fantastique.
Quant à Stan, lui, c'est une inspiration éternelle, et ça devrait l'être presque plus que n'importe quel autre joueur suisse pour toutes les futures générations, car il a un talent qui est très dur... Que peu de personnes ont, c'est une chose d'avoir le toucher, etc., la science du jeu, évidemment, ça il l'a aussi, mais il a la besogne, le travail... Je pense que je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui était aussi travailleur que lui, et, je pense que son histoire, de la proximité que j'ai évidemment avec Dimitri aussi, cela m'a permis de comprendre tout ce travail aussi. J'ai de la chance d'ailleurs, de ce côté-là ! C'est un exemple au quotidien, vraiment, Stan, peu importe, il tombe, il se relève, il tombe il se relève, il continue.
Et en fait, maintenant, il ne tombe plus tant que ça ! Et maintenant il a décidé de gagner je ne sais combien de Grands Chelems. Déjà, Roger le faisait, Martina le faisait en double... Stan… Moi, parfois je gagne un tournoi, on dit : « D'accord... ». Mais les autres, ils ont des Grands Chelems ! Du coup, ils me poussent tous les trois, et tous les autres joueurs, Belinda aussi, Victoria aussi, à aller encore plus haut, à ne pas avoir de limites ! Et puis, on ne sait pas où elle est la limite. Du coup, je pense, tous à leur façon, ils m'inspirent, même si c'est parfois dur de faire partie de ce groupe de martiens ! Je suis très fière, en fait, de juste être à leur talon pour l'instant. Et puis, cela me motive en tout cas largement pour aller encore plus haut.