Tennis. ITW - Nicolas Mahut : "On peut s'attendre à une saison blanche..."
Par Tennis Actu le 15/05/2020 à 18:36
Journée d'entrainement après confinement ce mercredi à Paris au Centre National d'Entrainement (CNE) de la Fédération Française de Tennis... ! Sur le court, les Français Nicolas Mahut et Grégoire Barrère entourés de leur entraineurs et observés par le Docteur Bernard Montalvan et le Directeur technique national Pierre Cherret... sans oublier les quelques journalistes invités à l'occasion. Tout ce beau monde, bien sûr, masqués - sauf les joueurs sur le court - respectant scrupuleusement les consignes sanitaires et s'adaptant aux règles en vigueur. Après sa séance d'entrainement du jour face à Grégoire Barrère, Nicolas Mahut nous raconte les conditions très spéciales pour désormais s'entrainer et jouer au tennis, comment il voit la suite de la saison, sa vie professionnelle et ses inquiétudes mais aussi Roland-Garros. Nicolas Mahut et son autre vie de joueur post confinement : "C'est compliqué, on ne veut pas penser à la saison blanche et on veut y croire à Roland-Garros en septembre."
Vidéo - Nicolas Mahut ce mercredi au CNE de la FFT à Paris !
"Se faire plaisir, et on verra plus tard pour des vraies séances."
Nicolas Mahut, que l'on devinait le sourire au lèvres malgré son masque, a tout d'abord évoqué ses sensations lors de son retour sur le court. "Ça fait du bien de rejouer au tennis. Ça avait manqué à tout le monde, à nous les joueurs, et aux entraîneurs. C’était bien de revoir un peu tout le monde. On s’était appelés avec les entraîneurs, mais on ne s’était pas revus. C’est sympa de se revoir sur un terrain de tennis, même si pour l’instant c’est simplement pour se dégourdir les jambes, retrouver le contact avec la raquette et la balle. Pour l’instant ça ne va pas plus loin, mais ça fait du bien."
Un retour qui présente selon lui quelques risques, et des aspects du jeu qu'il faudra bien retravailler. "Le gros risque, c’est de se blesser. Déjà là, on a joué tranquille pendant une heure et il y a déjà des petits bobos qui apparaissent. Y aller doucement, se faire plaisir, et on verra plus tard pour refaire des vraies séances. Ce qui est très difficile c’est les pieds. La sensation avec la raquette, on la perd très peu. C'est surtout le service, et puis le jeu de jambes. Les pieds sont lourds, on a l’impression d’avoir des sabots, l’impression que la balle va très vite. C’est compliqué, mais en même temps on n’a pas tellement d’attentes. [...] Avant de revoir du haut niveau, il va falloir attendre un petit peu."
"On n'a aucune visibilité sur la reprise, c'est très compliqué."
Concernant la motivation de reprendre, l'ex n°1 en double semble un peu plus soucieux. "Je pense qu’il y a eu beaucoup de lassitude de la part de beaucoup de joueurs. Dans un premier temps, il y a le souci de rester en forme, de maintenir sa condition physique. Pour certains, de pas prendre trop de poids, pour d’autres de pas trop rester dans le canapé. Il y a aussi une question d’hygiène, parce qu’on peut vite avoir tendance à passer ses journée dans le canapé, et puis entrer dans une sorte de lassitude psychologique. C’était assez compliqué à gérer. Et puis après effectivement, ce qui est difficile c’est de se projeter. Nous, les athlètes de haut niveau, on a besoin d’objectifs avancer. Là pour l’instant, on n’a aucune visibilité sur la reprise, donc c’est très compliqué." En effet, le circuit est censé reprendre le 13 juillet, une date qui semble à présent bien idyllique compte tenu de la progression de la crise.
"On peut s'attendre à une saison blanche..."
Questionné ensuite sur la suite de la saison, Nicolas Mahut n'a pas écarté la possibilité d'un retour en 2021. "Je crois qu’un peu à l’image du virus, ça change pratiquement chaque jour, chaque semaine on change d’état d’esprit. Au début on pensait reprendre pour Monte-Carlo, puis sur terre pour Roland. Finalement très rapidement ça a été annulé, Wimbledon… Et puis d’un coup on est passé à 'c’est sûr qu’il va pas y avoir du tout de tennis'. Et là ces derniers jours on reprend un petit peu espoir."
"Moi, mon côté optimiste me dirait qu’on va pouvoir jouer Roland, et c’est pour ça qu’on essaie de reprendre l’entraînement et de garder la joie et la bonne humeur. Mais mon côté plus réaliste me dit qu’on peut s’attendre à une saison très compliquée, voire une saison blanche... Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut pas se permettre de reprendre le circuit s’il y a un risque de contamination, je crois qu’on est tous d’accord là-dessus. Après, est-ce que le huit-clos est une solution ? Je n’en sais rien. Tout est envisagé, en tout cas je sais que Roland travaille dessus. Je crois que ce n’est pas le moment de rentrer dans des polémiques, il faut être prudent et patient."
"Payer le staff, on est une petite minorité à pouvoir se le permettre."
Mais un joueur de tennis, c'est aussi toute une équipe qui s'active derrière au quotidien, qu'il faut bien rémunérer. Faisable pour Mahut, mais pas pour tout le monde. "Je pense que c’était très compliqué pour l’ensemble des acteurs, pour les joueurs qui n’ont pas de tournois, mais aussi tout l’écosystème qui est autour. Moi, j’ai eu la chance d’avoir des belles saisons les années précédentes, qui me permettent pour l’instant de continuer à payer mon staff, mais il est évident que si la situation devait perdurer ce serait compliqué. Pour l’instant la question ne se pose pas, je veux aussi qu’ils puissent être sereins. On est une petite minorité à pouvoir se le permettre. Forcément, il n’y a plus les bonus de résultats, mais en tout cas les fixes sont là pour qu’ils puissent continuer à vivre. Par contre, je suis dans une Académie, la All-In, et il y a d’autres joueurs qui sont moins bien classés, et pour eux c’est plus difficile."
"Il y a des joueurs qui vont être en grande difficulté."
Car selon lui, des joueurs qui pourraient être amenés à remettre leur carrière en question, il y en aura. "Directement, je n’ai pas eu ces discussions avec des joueurs, mais c’est la réalité du circuit. Et il faut attendre de voir l’aide qui va être apportée. Il y a des joueurs qui vont se retrouver en grande difficulté. C’est aussi pour cela que la Fédération a un plan de financement, de 35 millions je crois, qui reste à définir. Est-ce que ce sera à travers des tournois organisés, ou à travers des bourses ? C’est sûr qu’il y a des joueurs qui vont être en difficulté. Et ce n’est pas comme une blessure, là c’est un sentiment différent car on n'était pas en vacances, on n’était pas en blessure, c’est une situation très très complexe à gérer. Même si j’ai une longue carrière et beaucoup d’années derrière moi, c’est une nouveauté et une nouvelle expérience pour moi."